Pour lire la biographie complète de la comédienne : Rachel
Extraits :
Née dans la pauvreté, sur les chemins que suivait son père, colporteur juif, elle a, dès son enfance, connu, avec ses frère et sœurs, l'humiliation et la mendicité. Mise par son père à l'école artistique de Choron à Paris, elle réussit à se faire remarquer successivement par deux sociétaires de la Comédie-Française, le bon Saint-Aulaire, humble pédagogue à l'école du Théâtre Molière, et surtout Samson, éminent professeur au Conservatoire d'Art dramatique, qui lui donna la véritable éducation qui lui manquait. Une énergie singulière, une élégance innée, une passion pour l'alexandrin et la tragédie, une volonté à toute épreuve, avec ces qualités-là, la petite Elisa Félix , dite Rachel, allait bientôt créer l'événement à la Comédie-Française.
Les premiers débuts de Rachel au Théâtre-Français, en juin-juillet 1838,
la confrontent immédiatement avec trois grands textes du répertoire
classique et justifient le souvenir de jeune déité antique qu'elle
laissa dans la mémoire de ses premiers admirateurs : Horace et Cinna , de Corneille, et Andromaque , de Racine.
Echaudée par cette incursion malheureuse dans le
répertoire de son temps, elle va mettre désormais toute son énergie à
préparer ce qui doit être son triomphe,
Phèdre , que, à peine cinq ans après ses débuts, elle se sent prête à interpréter, à vingt-deux ans…
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Rachel dans le rôle de Phèdre, Comédie Française, 1843 |
Le décor est le grand palais grec qui sert également pour Andromaque ,
planté un peu différemment. Théophile Gautier avoue : « pendant deux
heures, elle nous a représenté Phèdre sans que l'illusion cessât une
minute, malgré cette abominable colonnade dans le goût messidor qui
sert, ou plutôt qui ne sert pas de décoration, malgré ces affreux
fauteuils de comptoir qui ont des serviettes dans le dos, malgré la
nuance intermédiaire entre l'abricot et le potiron de la tunique
d'Hippolyte, malgré les rideaux de salle à manger qui formaient le
vêtement d'Œnone »
Il est temps de rappeler que c'est le comédien lui-même qui compose sa
garde-robe, surtout dans les pièces du répertoire, et que nul « metteur
en scène » ne veille encore à l'unité des costumes d'une représentation,
sauf dans le cas d'une création contemporaine, où l'auteur a le droit
d'intervenir. « La tâche d'un acteur, dit Gautier, ne se borne pas à
réciter convenablement les paroles d'un rôle, il faut qu'il en réalise
la physionomie, la configuration extérieure ; il faut que le public
puisse s'imaginer que c'est le personnage même qui parle ; (…) Le
diadème, le voile, le péplum moucheté d'étincelles d'or, la tunique, le
manteau de pourpre, tout était du meilleur goût. » Pour une fois,
Gautier et Janin sont d'accord. Si le premier trouve l'entrée de Rachel
« sublime », l'autre la trouve « superbe ». L'iconographie ne manque pas
, Phèdre étant le rôle dans lequel Rachel a été le plus souvent
dessinée, peinte, sculptée et même photographiée. Elle entre à la scène 3
du premier acte, pâle, les yeux rougis, les bras inertes, sous
l'accumulation des tuniques et des draperies : sur une tunique de
couleur chamois brodée d'or, elle porte un léger péplum en barège blanc
brodé d'or, sur les épaules un premier manteau blanc brodé, et sur
l'épaule un manteau rouge brodé d'or.
Au front un diadème doré orné de
pierres précieuses – celui que lui ont offert ses camarades de la
Comédie-Française en 1839 – d'où s'échappe un long voile en crêpe lisse
brodé d'or. Elle va se débarrasser du premier manteau dans les premières
scènes et apparaîtra à la fin, mourante, le péplum palpitant sur la
lourde tunique, et le manteau pourpre rejeté en arrière. Le public est
conquis, les applaudissements tonnent, on la redemande même après le
quatrième acte. Elle a l'intelligence de ne pas céder, gardant intacte
l'impression qu'elle doit donner du rôle. Gautier, mauvaise langue,
prétend que, dès qu'elle rentre dans la coulisse, les spectateurs
cessent de s'intéresser à ce qui se passe sur scène, se mettent à
tousser, à se moucher, à bavarder entre eux. « C'est faire sentir trop
durement à de pauvres diables d'acteurs, qui n'en peuvent mais, que l'on
ne se soucie d'eux en aucune façon.- S'ils avaient été bien habillés,
on se serait amusé à regarder leurs costumes en attendant. » Et de
réclamer à nouveau qu'elle s'intéresse aux auteurs vivants !
Quant à Janin, il ne se sent plus :
« En vérité, c'est elle… elle porte à son front une étoile… Elle attire,
elle plaît, elle charme, elle enchante, avec cet air aisé et naturel
attaché à sa personne, indépendant de tout ce qui est le rôle étudié !
La voilà donc ! Sa démarche est fière et son geste est charmant ; le
vêtement antique s'arrange de la façon la plus vraie et la plus fière
autour de cette jeune et frêle beauté ; sa voix forte et flexible se
passionne jusque dans les moindres choses… »
Mlle Rachel dans le rôle de Phèdre
CLESINGER Jean-Baptiste ; BARBEDIENNE Ferdinand 1850
Elle porte un
bracelet en forme de serpent au bras droit et un poignard.
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Francisque Duret, Rachel dans le rôle de Phèdre (1865) |
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Diadème porté par Rachel dans le rôle de Phèdre (1843) lien |
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Frédérique O’Connel, (1823-1885) Rachel dans le rôle de Phèdre, 1850
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A suivre, d'autres grandes actrices interprètes du rôle de Phèdre!
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