Éditeur : Philippe Rey
07/01/2016
Port-au-Prince. Une famille négocie sa
survie au jour le jour : il est maître pelle sur un chantier ; elle est
repasseuse chez les messieurs célibataires du quartier, n’hésitant pas à
se donner à eux car sinon « la chaudière ne monterait pas le feu ».
Cinq enfants. Leur fille aînée, Babette, adolescente, est leur seul
espoir : elle a son brevet, et sa beauté leur offrira un gendre riche.
Sa mère la rêve en Shakira.
Un certain M. Erickson se présente un
jour, bien plus âgé qu’elle, généreux pour la famille qu’il installe
dans une confortable maison. Mais qui est-il réellement, cet homme
mystérieux aux trois maîtresses, vivant dans le luxe, entouré de gardes
du corps ? Pourquoi métamorphose-t-il Babette en blonde au point que le
quartier la nomme dorénavant la Barbie d’Erickson ?
Sa mère constate, désolée : « Ma fille
n’est plus ma fille ». En « putanisant » Babette, ses parents semblent
s’être engagés sur une voie aux multiples périls, dont ils pressentent
avec effroi qu’elle est sans retour.
Dans Les brasseurs de la ville,
épopée à travers les quartiers pauvres de Port-au-Prince, chaque
personnage invente ses propres pas pour danser avec sa croix.
Evains
Wêche signe un talentueux premier roman qui met en lumière la lutte du
peuple haïtien contre la déchéance et la mort, un peuple qui brasse la
ville entre les bruits et les fureurs où s’entremêlent des histoires de
courage, d’amour et de folie.
Mon petit mot
Port-au-Prince est presque le personnage principal de ce premier roman . Ou plus encore Carrefour , quartier particulièrement pauvre et insalubre d'Haiti. Ses couleurs, ses parfums, le grouillement de la vie. Ses drames.
L'écriture est un peu déroutante au début, les voix du père et de la mère alternent, se répondent, se mélangent, perdent parfois un peu le lecteur, dans un rythme en phase avec le bouillonnement de la cité.
A travers le destin, particulièrement tragique, d'une famille, l'auteur nous donne à voir et à entendre la misère de ce pays, les tentatives plus au moins désespérées pour améliorer un peu le quotidien.
Entre corruption, incapacité des organisations internationales, un peuple à l'abandon, qui se débrouille comme il peut... jusqu'où peut-on aller pour nourrir sa famille?
On se doute dès le départ que tout cela finira mal, on assiste à un engrenage infernal, une descente aux enfers, pages après pages...
Noir, cru, un livre qui lève le voile sur la réalité d'un pays un peu oublié. C'est aussi ça la littérature.
Lu dans le cadre des 68 premières fois
et du
Libellés : littérature