ELLE BRULE Cie les Hommes Approximatifs / Mise en scène : Caroline Guiela Nguyen

écriture au plateau Les Hommes Approximatifs
textes Mariette Navarro
mise en scène Caroline Guiela Nguyen

avec
Boutaïna El Fekkak, Margaux Fabre, Alexandre Michel, Ruth Nüesch, Jean-Claude Oudoul, Pierric Plathier

scénographie Alice Duchange
costumes Benjamin Moreau
création lumière Jérémie Papin
création sonore Antoine Richard
vidéo Jérémie Scheidler
collaboratrice artistique Claire Calvi
suivi artistique Julien Fišera
stagiaire à la dramaturgie Manon Worms

Emma est morte. Derrière elle, elle laisse cinq personnes confrontées à l’énigme d’une disparition brutale.
Comment en est-elle arrivée là ? Pourquoi n’ont-ils rien vu ?
À rebours de cet aveuglement, le spectacle va s’efforcer de tout montrer. Se déroule alors sous nos yeux, avec la précision quasi clinique d’une reconstitution policière, l’effritement progressif du bonheur domestique sous la pression des désirs, de la frustration, du mensonge.
On pense forcément à Emma Bovary, mais on en est assez loin. La mélancolie d’Emma, son incapacité à vivre n’ont rien de romantique, elle ne brûle ni de passion, ni même d’ennui, elle se consume. Et il y a d’autres inspirations, en particulier l’histoire de Jean-Claude Romand qui a fait croire à sa famille pendant vingt ans qu’il travaillait…
Le texte de Mariette Navarro s’est construit au cœur du processus de création, à partir d’improvisations sur le plateau, en restituant et en construisant la parole des comédiens. La scénographie a été mise en place avant les répétitions pour délimiter l’espace où les personnages allaient évoluer. La mise en scène de Caroline Guiela Nguyen aborde avec délicatesse cette histoire dérangeante. Deux ans de travail ont été nécessaires pour que cette proposition théâtrale contemporaine et particulière existe.



Et comme sous l’effet d’une loupe, notre réalité la plus banale revêt soudain une fascinante étrangeté.
Nourrie de fictions (théâtrales, romanesques, cinématographiques, télévisuelles…), Caroline Guiela Nguyen et son équipe construisent des histoires qui allient la fluidité de la narration à la densité du détail. Avec un style déjà bien à elle, la metteuse en scène ne fait pas que parler de l’intime : elle en fait la matière même de son travail – un travail de longue haleine, qui donne aux comédiens le temps de s’apprivoiser, de se construire une histoire, un territoire communs.
Ce compagnonnage au long cours, laissant jusque dans la représentation une large place à l’improvisation, fait exploser cette matière vive, brûlante, dans un spectacle qui dissèque au scalpel l’apparente banalité de nos existences quotidiennes.

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Mon petit mot

Dès l'entrée dans le hall du théâtre, nous voilà plongés dans l'univers de la pièce : une exposition d'objets du quotidien de la famille, entre armoire à pharmacie et post-its du frigo, dessins d'enfant et message enregistré sur le répondeur, le cadre est posé : la réalité toute simple d'un foyer "comme les autres"? Pas sûr... tranquillisants par-ci, courrier d'une société de crédit de l'autre.. premiers indices...
Le décor sur le plateau confirme la tendance, un hyper-réalisme, autour d'une famille contemporaine, multi-ethnique.

Les dialogues également, sonnent "quotidien", la langue de tous les jours, des petits déjeuners plus vrais que nature... un parti pris de montrer le quotidien dans ses moindres détails pour mieux en révéler les failles... car ces personnages (qui gardent certains secrets) révèlent bien des problèmes.

Du couple qui se fissure au surendettement, des relations parents-enfant-grand-mère malade, aux  patientes du docteur... tout explose sous le joli verni de cet intérieur qui se décompose peu à peu ...et autour de cette femme qui sombre, personne ne voit rien...
Et comme ces personnages nous cachent à nous aussi beaucoup de choses, c'est à chacun de se faire sa propre petite histoire sur tout ce qui a pu conduire Emma à en arriver là.

Après un temps d'adaptation au début de la pièce face à cet hyper-réalisme, les marques par exemple qui font irruption dans les dialogues, cela surprend, mais aussi s'y  retrouver dans les flash - backs et autour de ce fantôme (?) blanc m'a laissée un peu sans réponse , je me suis prise au jeu de cette "enquête", guettant les indices révélateurs du mal-être d'Emma. Les scènes s'enchaînent, le temps remonte - ré-avance- recule, saisissant à chaque fois quelques instants du quotidien de cette famille, qui, mis bout à bout, finissent par nous conduire à comprendre ce suicide.


A noter également l'efficacité du travail des lumières, qui soulignent en particulier les ellipses temporelles.
Autour de Boutaïna El Fekkak dans le rôle d'Emma, l'ensemble de la distribution est à saluer, j'ai trouvé vraiment intéressant ce choix de conception du spectacle et cette écriture particulière qui en est le cœur, bref, une compagnie à suivre!.




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