A travers Marie Dorval, c'est toute l'histoire littéraire et théâtrale de l'époque qui se révèle, et la naissance et la propagation du théâtre romantique. Et puis c'est aussi l'histoire d'une femme, tantôt au sommet de la gloire, tantôt tragique, dont la légende s'est vite emparée, avant d'être un peu oubliée, et c'est dommage.
En espérant que cela vous donne envie de vous plonger à votre tout dans l'une ou l'autre de ses biographies ou de celles de ceux avec qui elle était liée : Alfred de Vigny, George Sand, Dumas....
Je prévois une série de 3 ou 4 articles... à suivre!
Marie Dorval en quelques citations d'abord pour mieux cerner la femme et l'actrice;
Grand génie et grand cœur, c'était dit George Sand, une des plus grandes artistes et une des meilleures femmes de ce siècle. Tout était passion chez elle, la maternité, l'art, l'amitié, le dévouement, l'indignation, l'aspiration religieuse....
Elle l'évoque également dans ce texte : Chopin, Musset, Marie Dorval, Vous m’avez déjà tous quittée Et c’est sans vous que je vivrai Vous êtes parmi les étoiles Mais c’est avec le souvenir D’avoir été aimée de vous Que j’accepterai de vieillir Comme une femme qui tient debout.
Jules de Prémaray dit d'elle : Marie Dorval était une de ces riches natures toutes d'amour et de poésie, qui se développent toutes seules sans culture, de même que les plantes luxuriantes du tropique. Son jeu, c'était le cri de l'âme. Elle ne composait pas un rôle, elle le sentait; elle ne feignait pas un sentiment, elle l'éprouvait sincèrement. Aussi, de toutes les comédiennes, Marie Dorval est celle qui a communiqué le plus facilement son émotion au public. On a voulu faire de Marie Dorval l'actrice d'une école littéraire. Quelle erreur! Marie Dorval n'était d'aucune école, ou plutôt elle était de la sienne, que nous appellerons d'école de la vérité!
Adèle Hugo "Marie Dorval n'avait pas la raideur tragique, elle avait la souplesse de la réalité. [...] Elle était la délicatesse même, la poésie, la grâce [..]elle était faite pour la famille, humble, discrète, domestique, mère et grand-mère"
Mes principales lectures :
- Mademoiselle Mars et Marie Dorval au théâtre et dans la vie de Francis Ambrière
- Marie Dorval, 1789-1849, documents inédits. Biographie critique et bibliographie. Par E. Coupy.de Émile Coupy (1868)
- La dernière année de Marie Dorval, Alexandre Dumas
- Lettres pour lire au lit : Correspondance amoureuse d'Alfred de Vigny et de Marie Dorval, 1831-1838
- Comédiennes : Les actrices en France au XIXe siècle de Anne Martin-Fugier
- Théophile Gautier Histoire du romantisme
- Marie Dorval : grandeur et misère d'une actrice romantique par A Gaylor .
- Histoire de ma vie / George Sand : vol. 9
et les archives Gallica et BNF
L'enfance, l'adolescence de Marie Delaunay, ...
Marie Dorval, née Marie Amélie Thomase Delaunay, fille et petite-fille de comédiens itinérants, est une vraie enfant de la balle. Née le 6 janvier 1798 à Lorient et morte le 20 mars 1849 à Paris , abandonnée par son père dès son plus jeune âge, elle joue
d’abord des rôles d’enfants dans la troupe où joue sa mère et arpente avec elle les routes de France, de Suisse... dans une période politique trouble, qui ne pousse guère à fréquenter les théâtres. On suit leurs traces à Lausanne, Lille, Gand, Anvers... C'est sans doute à cette occasion que la future Marie Dorval fait ses premiers pas sur scènes. On les retrouve ensuite à nouveau en Bretagne, Brest, Laval, où Marie à 12 ans est engagée comme "deuxième chanteuse" et "troisième amoureuse".
" je suis venue au monde sur les grands chemins, j'ai été bercée aux durs cahots de la charrette. Je n'ai connu ni les jeux ni les joies de l'enfance. Je me rappelle encore, lorsque ma mère, me tenant par la main, me conduisait au théâtre, de quel oeil de regret je suivais les petites filles de la ville dansant en rond au milieu de la grande place, ou jouant sur la porte de leurs maisons. Je passais une partie de ma journée dans une salle noire, enfumée, froide, où le soleil ne pénétrait jamais. La répétition finie, il fallait rentrer, manger un morceau à la hâte, faire son paquet et se rendre à la représentation du soir. Quand je ne jouais pas, ce qui arrivait
assez rarement, j'accompagnais ma mère pour l'aider à s'habiller. Je me couchais accablée de fatigue, et si
j'entrevoyais quelquefois le ciel bleu, les arbres, la verdure, les fleurs, si j'entendais chanter les oiseaux, ce
n'était que dans mes rêves. Ma mère, pauvre femme, n'aurait pas mieux demandé que de m'aimer, mais en avait-elle le temps ? Est-ce qu'on peut être mère d'ailleurs dans cette atmosphère de luttes, de misère, d'orgueil, de passions violentes ou vulgaires qui est la vie de la pauvre comédienne nomade".
Marie Dorval vue par George Sand (histoire de ma vie, tome 9)
Des souvenirs d'enfance qui la pousseront à tenter de tenir éloignées ses propres filles du théâtre par la suite et une relation avec sa mère que George Sand analyse ainsi:
" Née sur les tréteaux de province, élevée dans le travail et la misère,
Marie Dorval avait grandi à la fois souffreteuse et forte; jolie et
fanée, gaie comme un enfant, triste et bonne comme un ange condamné à
marcher sur les plus durs chemins de la vie. Sa mère était de ces
natures exaltées qui excitent de trop bonne heure la sensibilité de
leurs enfants. A la moindre faute de Marie, elle lui disait: « Vous me
tuez, vous me faites mourir de chagrin! » Et la pauvre petite, prenant
au sérieux ces reproches exagérés, passait des nuits entières dans les
larmes, priant avec ardeur, et demandant à Dieu, avec des repentirs et
des remords navrants, de lui rendre sa mère, qu'elle s'accusait d'avoir
assassinée; et le tout pour une robe déchirée ou un mouchoir perdu.
Ébranlée ainsi dès l'enfance, la vie d'émotions se développa en elle,
intense, inépuisable, et en quelque sorte nécessaire. Comme ces plantes délicates et charmantes que l'on voit pousser,
fleurir, mourir et renaître sans cesse, fortement attachées au roc, sous
la foudre des cataractes, cette âme exquise, toujours pliée sous le
poids des violentes douleurs , s'épanouissait au moindre rayon de soleil
, et cherchait avec avidité le souffle de la vie autour d'elle,
quelque fugitif, quelque empoisonné parfois qu'il pût être. Ennemie de
toute prévoyance, elle trouvait dans la force de son imagination et
dans l'ardeur de son âme les joies d'un jour, les illusions d'une heure
, que devaient suivre les étonnements naïfs ou les regrets amers.
Généreuse, elle oubliait ou pardonnait ; et , se heurtant sans cesse à
des chagrins renaissants, à des déceptions nouvelles , elle vivait,
elle aimait, elle souffrait toujours. Tout était passion chez elle , la
maternité, l'art, l'amitié, le dévouement, l'indignation, l'aspiration
religieuse; et comme elle ne savait et ne voulait rien modérer, rien
refouler, son existence était d'une plénitude effrayante , d'une agitation au dessus des forces humaines [...] C'était le résumé de l'inquiétude féminine arrivée à sa plus haute
puissance. Mais c'en était aussi l'expression la plus intéressante et la
plus sincère. Ne dissimulant rien d'elle-même, elle n'arrangeait et
n'affectait rien. Elle avait un abandon d'une rare éloquence ; éloquence
parfois sauvage , jamais triviale , toujours chaste dans sa crudité et
trahissant partout la recherche de l'idéal insaisissable, le rêve du
bonheur pur, le ciel sur la terre. Cette intelligence supérieure, inouïe de science psychologique et riche d'observations fines et
profondes , passait du sévère au plaisant avec une mobilité
stupéfiante. Quand elle racontait sa vie , c'est-à-dire son déboire de
la veille et sa croyance au lendemain , c'était au milieu de larmes
amères et de rires entraînants qui dramatisaient ou éclairaient son
visage, sa pantomime, tout son être, de lueurs tour à tour terribles et
brillantes.[...]Parfois, cependant, c'était une gaieté
désespérée ; mais bientôt le rire vrai s'emparait d'elle et lui don nait
de nouvelles puissances. C'était la balle élastique qui touchait la
terre pour rebondir sans cesse. Ceux qui l'écoutaient une heure en
étaient éblouis. Ceux qui l'écoutaient des jours entiers la quittaient
brisés , mais attachés à cette destinée fatale par un invincible attrait, celui qui attire la souffrance vers la souffrance et la tendresse du cœur vers l'abîme des cœurs navrés.
Lorsque je la connus , elle était dans
tout l'éclat de son talent et de sa gloire. Elle jouait Antony et Marion
Delorme. Avant de prendre la place qui lui était due , elle avait passé
par toutes les vicissitudes de la vie nomade. Elle avait fait partie
de troupes ambulantes dont le directeur proposait une partie de dominos
sur le théâtre à l'amateur le plus fort de la société , pour égayer lentr'acte. Elle avait chanté dans les chœurs de Joseph, grimpée sur une
échelle et cou verte d'un parapluie pour quatre, la coulisse du théâtre
(c'était une ancienne église) étant tombée en ruines , et les choristes
étant obligés de se tenir là sur une brèche masquée de toiles , par une
pluie battante. Le chœur avait été interrompu par l'exclamation d'un
des coryphées criant à celui qui était sur l'échelon au-dessus de lui : «
Animal , tu me crèves l'œil avec ton parapluie ! à bas le parapluie! » A
quatorze ans, elle jouait Fanchette dans le Mariage de Figaro , et je
ne sais plus quel rôle dans une autre pièce. Elle ne possédait au monde
qu'une robe, une petite robe blanche qui servait pour les deux rôles.
Seulement , pour donner à Fanchette une tournure espagnole, elle cousait
une bande de calicot rouge au bas de sa jupe, et la décousait vite après la pièce , pour avoir
l'air de mettre un autre costume, quand les deux pièces étaient jouées
le même soir. Dans le jour, vêtue d'un étroit fourreau d'enfant en
tricot de laine , elle lavait et repassait sa précieuse robe blanche. Un
jour qu'elle était ainsi vêtue et ainsi occupée, un vieux riche de
province vint lui offrir son cœur et ses écus. Elle lui jeta son fer à
repasser au visage , et alla conter cette insulte à un petit garçon de
quinze ans qu'elle regardait comme son amoureux et qui voulut tuer le
séducteur."
Où Marie Delaunay Bourdais devient Marie Allan-Dorval
Après Laval à l'été 1810, la mère et la fille jouent à Saint-Malo, Rennes, au Mans, puis à l'hiver 1812 - 1813 on les retrouve à Pau, Bagnères et Tarbes. Marie a alors aussi bien des engagements comme actrice que comme chanteuse d'opéra.
En 1813 alors qu'elle a 15 ans, c'est à Lorient que l'on retrouve Marie et sa mère. Marie commence à se faire remarquer sur les scènes locales et, enceinte de sa première fille, elle épouse à Vannes, où la troupe est en représentation, le 12 février 1814, Louis-Etienne Allan dit Dorval, homme de théâtre de 36 ans et régisseur de la troupe qui vient d'engager les deux femmes.
Le couple continue à jouer en Bretagne où deux filles, Louise, le 19 juillet 1814 à Vannes, puis Gabrielle le 30 octobre 1815 à Lorient, naissent de cette union.
Marie, sa mère et son mari font alors partie de la même troupe qui sillonnent la Bretagne puis en 1816 ils partent pour le Théâtre de Strasbourg. Marie Bourdais, sa mère meurt de la tuberculose.
Un soir on demande à Marie Allan-Dorval comme on l'appelle alors , de remplacer une actrice au pied-levé, qui venait de se casse la jambe. Elle remporte un joli succès ce soir là et en 1818 c'est à Paris qu'elle part tenter sa chance.
La famille s'installe rue des Vinaigriers, à quelques rues du théâtre de la Porte-Saint-Martin.
Marie décroche d'abord un rôle de choriste à la salle Ventadour pour un opéra-comique. Allan-Dorval part peu après pour un contrat à
Saint-Pétersbourg, mais il va mourir à peine arrivé en Russie, laissant à 20 ans,
Marie Dorval , veuve avec deux filles en bas âge.
Voici comment elle évoquait cette période de sa vie quelques années plus tard en 1823 pour le journal Le corsaire : "Je suis fille d'artistes, cousine de Baptiste des Français et nièce de Bourdais qui a joué longtemps à Paris les comiques. J'ai commencé la comédie fort jeune. [A Strasbourg] mon emploi était, dans l'opéra, les Dugazon et Saint-Aubin, dans la comédie les jeunes premières. Je restais deux ans dans cette ville. J'étais tellement aimée que bientôt on me fit jouer des rôles d'une trop grande importance pour une jeune comédienne et qui ne convenaient point à mon âge, tels que La femme jalouse, la mère coupable.. Je n'y étais probablement pas bonne, mais le public applaudissait à outrance les espérances que je donnais. "
Marie Dorval au théâtre de la Porte Saint-Martin
En 1818, elle fait ses début au théâtre de la Porte-Saint-Martin, à Paris, où elle joue plusieurs pièces en compagnie de Potier. Elle suit également quelques cours au conservatoire, dans la classe de Lafon, dans le même groupe que Frédérick Lemaitre qu'elle retrouvera par la suite, mais on lui dit qu'elle n'est pas faite pour le drame, que sa nature comique doit lui faire préférer les rôles de soubrettes... Ce n'est pas ainsi qu'elle envisage le théâtre, et ce ne sont en effet pas dans les rôles comiques qu'elle triomphera, elle qui va devenir l'égérie du drame romantique... Comme quoi..., bref, elle quitte très vite l'institution.
autographe Marie Dorval
Vigny lui écrira d'ailleurs le contraire en 1833 "Tu seras toujours tragédienne quand tu joueras cent comédies aussi parfaitement que tu joues Jeanne Vaubernier et La jeune femme colère. [...]La gravité de ta voix, de tes tratis, de ta démarche, la tristesse naturelle qui est en toi, tout t'a créée tragédienne. [...)à ta place, je ne créerais jamais de rôle comique. Tu vois quel trône tu as dans la pensée des hommes qui s'imaginent trouver en toi un être toujours rêveur, mélancolique, tendre, souffrant. tu es tout cela. "
En 1821, elle accouche d'une troisième fille, Caroline, qu'elle a eut avec Alexandre Piccini, le directeur de musique du théâtre, compositeur et musicien. Elle venait de perdre auparavant deux autres petites-filles en bas-âge.
Théâtre de la porte Saint-Martin 1829
Les débuts de Marie Dorval:
Le mardi 12 mai 1818, Marie Dorval fait ses débuts à la Porte-Saint-Martin, dans le rôle de Paméla, de Paméla mariée , mélodrame de Pelletier de Volmeranges, puis le 14 mais dans Pauline des Frères à l'épreuve, du même auteur et le 14 juin dans Mathilde de Malhek-Adhel, d'après le roman de Mme Cotin.
Sa première création est celle d'Amélie, dans le mélodrame de Victor Ducange : La cabane de Montainard le 26 septembre 1818.
Marie Dorval dans Les deux forçats
1818 : La Cabane de Montainard ou les Auvergnats, mélodrame en 3 actes de Frédéric Dupetit-Méré et Victor Ducange (26 septembre) Rôle d'Amélie
1819 : Le Jeune Werther ou les Grandes Passions vaudeville de Michel-Joseph Gentil de Chavagnac dit Gentil (19 janvier) Rôle de Charlotte
1819 : Le Banc de sable ou les Naufragés français, mélodrame en 3 actes en prose de Frédéric Dupetit-Méré, Eugène Cantiran de Boirie et Jean-Toussaint Merle (14 avril) Rôle de Clémentine
1819 : Les Chefs écossais, mélodrame en 3 actes et en prose de René-Charles Guilbert de Pixerécourt (1er septembre) Rôle de Lady Hélène
1820 Le tailleur de Jean-Jacques, de Rougement, Merle, Simonin rôle de Mlle Clairon (13 juin)
1821 Le Vampire, de Nodier et carmouche rôle de Malvina (12 juillet)
1822 Le Solitaire, deCrosnier et St-Hilaire , rôle d'elodie (29 mars)
en 1822, changement de direction au théâtre de la porte Saint-Martin, avec l'arrivée de Jean-Toussaint Merle, futur époux de Marie Dorval (en 1829) , qui ambitionne de tirer vers le haut le répertoire de ce théâtre. Leur première rencontre n'est guère marquante "Merle, qui devint par la suite mon admirateur et mon mari, me trouvait dans les commencements laide, commune et inhabile à la scène" confiera-t-elle à Hugo.
Marie Dorval dans Le Château de Kenilworth
1822 : Le Château de Kenilworth, mélodrame en 3 actes d'Eugène Cantiran de Boirie et Henri Lemaire d'après Walter Scott (23 mars) ; musique
d'Alexandre ; ballets de Blache ; décors de Cicéri ; avec Marie Dorval
dans le rôle d'Elisabeth d'Angleterre, Chéri dans le rôle de Robert
Dudley et Thérigny dans le rôle d'Edmond Tressilian
"Elle a déployé dans le rôle d'Elisabeth une noblesse et une dignité qui lui ont mérité de nombreux applaudissements" écrit le Courrier des spectacles
1822 : Les Deux coups de sabre, mélodrame en 3 actes de Antony Béraud et Charles Puysaye (9 mai) Rôle d'Emma
1822 : Le Lépreux de la vallée d'Aoste, mélodrame en 3 actes de Hyacinthe Decomberousse, Théodore Baudouin d'Aubigny et Jean-Toussaint Merle (13 août) Rôle de la marquise de St-Salvator J.Jamin "c'est dans cette pièce qu'elle a poussé son premier cri, ce
fut un soir d'été dans une salle vide, mais ce grand cri, poussé dans le
désert, ne trouva même pas un écho pour le redire".
1822 : Les Deux Forçats ou la Meunière du Puy-de-Dôme, mélodrame en 3 actes d’Eugène Cantiran de Boirie, Pierre Carmouche et Alphonse André Véran (3 octobre) (j'y reviendrai dans un article spécifique)
1822 : Elfride ou la Vengeance, mélodrame en 3 actes de Martin Deslandes et Benjamin Antier (28 décembre)rôle d'Elfride
1823 : Les Deux Sergents, mélodrame en 3 actes de Théodore Baudouin d'Aubigny et Auguste Maillard (20 février) Rôle de Laurette
Valérien, ou le Jeune Aveugle, drame en 2 actes, imité de l'allemand d'August von Kotzebue, avec Thomas Sauvage, Paris, théâtre de la Porte-Saint-Martin, 17 avril 1823 Rôle travesti de Valérien
Dans cette pièce Marie Dorval joue un rôle travesti : Valérien, jeune aveugle qui va être guéri de sa cécité. Hors, quelques semaines plus tôt, à la Comédie Française, Mlle Mars avait crée une adaptation de cette pièce, transposée en Valérie. Nul doute que face aux premiers succès de Marie Dorval, la direction du théâtre de la Porte-Saint-Martin ait voulu avec ce Valérien poser le théâtre en rival du Français ou tout au moins améliorer son image, et que Marie Dorval leur semblait de taille à rivaliser avec la grande comédienne.
Il semblerait que le pari fut réussi : dans le Courrier des spectacles "Tout le monde s'accorde à reconnaître aujourd'hui que Mlle Mars seule, a fait le succès de Valérie. Au théâtre de la Porte-Saint-Martin, une femme aussi peut revendiquer une bonne part dans le succès. Mme Dorval a fait preuve d'une intelligence profonde, d'un tact et d'une très grande sensibilité dans le rôle de Valérien. J'engage toutes les personnes qui ont vu Valérie à voir Valérien".
1823 Le comédien de Poitiers de Merle , Carmouche et de Courcy
1824 Marthe ou le crime d'une mère de Saint-Maurice
1824 : Ourika ou l'Orpheline africaine, drame en 1 acte et en prose de Frédéric de Courcy et Jean-Toussaint Merle, musique Charles-Guillaume Alexandre (3 avril) rôle d'Ourika
1824 : Jane Shore, mélodrame en 3 actes de Armand-François Jouslin de La Salle, Hyacinthe Decomberousse, Alphonse de Chavanges, rôle de Jane
1824 : Le Commissionnaire, mélodrame en 3 actes d’Eugène Cantiran de Boirie, Ferdinand Laloue et Constant Ménissier (10 juin) rôle de Pauline
1824 : L'École du scandale, pièce en 3 actes et en prose de Charles-R.-E. de Saint-Maurice, Edmond Crosnier et Armand-François Jouslin de La Salle (8 décembre) rôle de Milady Tizlé
En 1824, le théâtre de la Porte-Saint-Martin bat des records en terme de recette, se selon la Pandore, sa comédienne vedette en est la cause "Elle semble redoubler d'intelligence chaque fois qu'elle parait sur la scène".
1825 : Le Petit Ramoneur, drame en 3 actes de Thomas Sauvage (23 juin), rôle de Rosalie
1825 : Le Docteur d'Altona, mélodrame en 3 actes de Alphonse de Chavanges, Hyacinthe Decomberousse et Auguste Maillard (18 octobre) rôle de Marie
1825 : La Fille du musicien, drame en 3 actes imité de Schiller d'Edmond Crosnier et Alexandre de Ferrière (10 décembre) (rôle de Louise) . Une anecdote au sujet de la préparation de ce rôle : Maris Dorval rappelaitquedanssajeunesseonluiavaitfaitjouerunepièce,laFilleduMusicien,danslaquelleelles'asphyxiaitenscène.CeltemortpréoccupaitbeaucoupMarieDorval,amantepassionnéedelavérité. -Commentmeurt-onparasphyxie?quelssontlespremierssymptômes?quellescrisessedéveloppent alors?commentlamortenvahit-ellelepatient? Pourrésoudrecesquestions,MarieDorvalnetrouvariendemieuxqued'allumerdanssachambre unréchauddecharbon,enayantsoindesetenirprèsd'unefenêtreafindefairejouerl'espagnolette quandellesentiraitsesforcesl'abandonner.LeréchaudbrûlaitpendantqueMarie,pleine d'enthousiasme,répétaitsonrôle. C'estbiencela,disait-elle,oui.Oh!quel succès!commec'estnature! Eneffet,c'étaitsinaturel quebientôtelletombait surleparquetsansavoirlaforcedefairejouer l'espagnolette. Heureusementpourelle,lacloisonjoignaitmal, etsesvoisins,ayantsentil'odeurdugazcarbonique, accoururentetsauvèrentlavieàMarieDorval. Lajeuneetdéjàcélèbreactriceenfutquittepour faireretarderdedeuxjourslapremièrereprésentationdumélodramequieutunimmensesuccès
1825 Le Caissier, de De la Salle et St- Maurice rôle d'Amélie
1826 : Le Monstre et le magicien, mélodrame-féerie en 3 actes d'Antony Béraud et Jean-Toussaint Merle (10 juin) rôle de Cécilia
Le monstre et le magicien, : costumes de Marie Dorval (Cecilia) et Cooke le
monstre
Jean-Toussaint Merle quitte alors la direction du théâtre pour se consacrer à l'écriture , tant toujours pour le théâtre, que pour le journalisme, et ce sera après son départ de la Porte-Saint-Martin que la relation jusque là professionnelle avec Marie Dorval basculera.
1826 : Le Contumace, mélodrame en 3 actes de Armand-François Jouslin de La Salle, Charles-R.-E. de Saint-Maurice, Edmond Crosnier 28 novembre Rôle de Jenny
1827 Les deux filles spectres, de Lemercier (8 novembre) rôle de la Duchesse de Francheville
1828 Le chasseur noir, de Antier et Nézel, 30 jnvier, rôle de Guilty
1828, La Fiancée de Lammermoor , de Ducange avec Marie Dorval et Frédérick Lemaître.
1828 : Faust, drame en 3 actes d'Antony Béraud, Jean-Toussaint Merle et Charles Nodier d'après Johann Wolfgang von Goethe (29 octobre) avec Marie Dorval (Marguerite), Frederic Lemaître (Méphistophélès), Zélie Paul (Martha)
Marie Dorval dans Faust
1829 : Rochester, drame en 3 actes et en 6 parties de Théodore Nézel et Benjamin Antier (17 janvier) avec Marie Dorval et Frédérick Lemaître Rôle de mistriss Wilkins
1829 : Sept Heures ou Charlotte Corday, mélodrame en 3 actes de Victor Ducange et Auguste Anicet-Bourgeois (23 mars) avec Marie Dorval et Frédérick Lemaître rôle de Mlle d'Armans
Charlotte de Corday et les Girondins" / par M. Charles Vatel, 1872 :
Sept heures ou Charlotte Corday, mélodrame de Victor Ducange et
Anicet-Bourgeois : costume de Marie Dorval
1829 : Macbeth, mélodrame en 5 actes avec un prologue d'Auguste Anicet-Bourgeois et Victor Ducange, imitation libre de Shakespeare (9 novembre)
1829 : Marino Faliero, mélodrame en 5 actes de Casimir Delavigne (30 mai)
avec Marie Dorval (Eléna) et Ligier Première pièce en vers à la Porte-Saint-Martin pour Marie Dorval. Le Courrier des Théâtres salue sa "diction pleine de convenance et de charme". Nodier précise qu'elle "marque un grand perfectionnement dans nos théories sur le système de diction, sur l'art de lire et de parler. La diction de Mme Dorval est parfaite, comme son talent". Delavigne "Les acteurs ont rivalisé de talent et de zèle, et l'on peut fonder sur eux les plus justes espérances".
costume de Marie Dorval (Eléna) dans Marino Faliero
Les mauvaises affaires du théâtre de la Porte-Saint-Martin la conduisirent en 1830 à rejoindre Frédérick Lemaître à l'Ambigu-Comique, où elle joua dans Péblo ou le jardinier de Valence de St-Amand et Dulong (rôle d'Elena) première le 4 mars, puis dans les Serfs polonais de Lemercier (rôle d'Anna), première le 15 juin.
dans Le Globe, à propos des Serfs polonais "Mme Dorval a sauvé par son admirable talent cette pièce dangereusement lancée et proche du naufrage. Son rôle est celui d'un Othello femme. C'est surtout dans la scène de jalousie du second acte qu'elle s'est montrée au dessus de tout éloge. Sa douleur, concentrée et profonde, ses gestes contenus et violents ont excité des applaudissements enthousiastes et mérités". (Cet article a vraisemblablement été écrit par Vigny pour laquelle il va bientôt se lancer dans l'écriture de la Maréchale d'Ancre "Je l'ai fait pour Mme dorval, je la crois la première tragédienne existante. C'est une femme de 29 ans, passionnée et spirituelle" écrit-il à un ami.
Elle revient ensuite à la Porte Saint-Martin dont Crosnier venait de prendre la direction.
Elle y joua alors entre autres :
1830 Les victimes cloîtrées de Monvel (19 août, jusqu'au 20 octobre)
Le Corsaire "Mme Dorval a produit beaucoup d'effet dans son rôle. Le public a revu avec plaisir cette actrice".
La semaine parle des moments sublimes qu'elle faisait vivre aux spectateurs subjugués.
1831 Beaumarchais à Madrid, de Halévy, rôle de Marie Beaumarchais, 1er mars , d'après le Clavigo de Johann Wolfgang von Goethe.
Le journal des comédiens : "Les honneurs de la soirée ont été pour Marie Dorval. Cette actrice remarquable a composé d'une manière admirable le rôle de Marie. Elle l'a nuancé avec un art infini. Tout a été exprimé par elle avec une vérité, un entraînement auquel on ne saurait résister. Des larmes coulaient de tous les yeux."
Le costume de Marie Dorval dans cette pièce a fait couler beaucoup d'encre à l'époque, fait unique dans sa carrière d'ailleurs :
Le Figaro "Mme Dorval est pour plus de la moitié dans la réussite [...]du reste, que de talent vrai, que de passion, que de larmes communicatives. Espérons que l’œuvre de l'auteur tiendra mieux que les épaulettes de l'actrice. Mais l'actrice soutient tout, excepté sa robe!".
Le journal des débats "Je ne sais rien de plus vaporeux que son costume, à peine attaché avec une épingle, toujours prêt à tomber, laissant entrevoir tantôt un bout d’épaule, tantôt un autre bout, et l'épaule est fort blanche. On voit rarement une nudité aussi coquette et aussi décente que celle-ci."
Je reviendrai dans un prochain article sur la deuxième partie de la vie de Marie Dorval .
A suivre! Mise à jour, les 4 articles biographiques