Titus n'aimait pas Bérénice Nathalie Azoulai

Quand on parle d'amour en France, Racine arrive toujours dans la conversation, à un moment ou à un autre, surtout quand il est question de chagrin, d'abandon. On ne cite pas Corneille, on cite Racine. Les gens déclament ses vers même sans les comprendre pour vous signifier une empathie, une émotion commune, une langue qui vous rapproche. Racine, c'est à la fois le patrimoine, mais quand on l'écoute bien, quand on s'y penche, c'est aussi du mystère, beaucoup de mystère. Autour de ce marbre classique et blanc, des ombres rôdent. Alors Nathalie Azoulai a eu envie d'aller y voir de plus près. Elle a imaginé un chagrin d'amour contemporain, Titus et Bérénice aujourd'hui, avec une Bérénice quittée, abandonnée, qui cherche à adoucir sa peine en remontant à la source, la Bérénice de Racine, et au-delà, Racine lui-même, sa vie, ses contradictions, sa langue.
La Bérénice de Nathalie Azoulai veut comprendre comment un homme de sa condition, dans son siècle, coincé entre Port-Royal et Versailles, entre le rigorisme janséniste et le faste de Louis XIV, a réussi à écrire des vers aussi justes et puissants sur la passion amoureuse, principalement du point de vue féminin. En un mot, elle ne cesse de se demander comment un homme comme lui peut avoir écrit des choses comme ça. C'est l'intention de ce roman où l'auteur a tout de même pris certaines libertés avec l'exactitude historique et biographique pour pouvoir raconter une histoire qui n'existe nulle part déjà consignée, à savoir celle d'une langue, d'un imaginaire, d'une topographie intime.
Il ne reste que peu d'écrits de Racine, quelques lettres à son fils, à Boileau mais rien qui relate ses tiraillements intimes. On dit que le reste a été brûlé. Ce roman passe certes par les faits et les dates mais ce ne sont que des portes, comme dans un slalom, entre lesquelles, on glane, on imagine, on écrit et qu'on bouscule sans pénalités.

Mon petit mot

C'est en découvrant ce livre en format poche en librairie que je me suis souvenue que le grand format dormait dans ma PAL!
Je ne savais pas trop à quoi m'attendre avec ce roman, je craignais que l'histoire d'amour contemporaine ( qui ne m'a pas vraiment emballée d'ailleurs, je serais bien restée uniquement dans la partie historique même si je comprends l'idée des parallèles tissées ) prenne le pas sur Racine, il n'en est (heureusement ) rien!

Nous plongeons dans le siècle de louis XIV, de Marly à Versailles, des fastes aux guerres, de La Fontaine à Vauban...  pour mieux forger une biographie romancée de Racine.

De son enfance à la fin de sa vie, un très beau portrait!
Les tiraillements psychologiques, la religion, le jansénisme, les femmes, religieuses ou comédiennes, tant d'amour divers, mais surtout l'amour des mots, de la langue, les heures passées à retoucher un vers, à faire sonner la langue, la rivalité avec Corneille, ... on redécouvre ces textes les plus célèbres côté coulisses, c'est très intéressant, on en apprend sur l'homme, sur l'époque, et sur la langue et sur cet auteur qui plaçait les femmes aux rôles titres, Bérénice et Phèdre en tête.

Pas d'inquiétude à avoir si on ne connaît pas bien ses oeuvres, l'ouvrage est accessible et donne envie d'en lire et relire.

objectif pal






Libellés :