Alors que chaque concert lui vaut un triomphe et qu’il se trouve au sommet de sa gloire, le chef d’orchestre Alexis Kandilis commet une indélicatesse dont les conséquences pourraient être irrémédiables. Sa réputation est ébranlée. Aux déceptions et revers qui s’ensuivent il oppose la certitude de son destin d’exception. Mais les blessures les plus anciennes se rappellent à son souvenir. L’insidieux leitmotiv des Kindertotenlieder – Les chants des enfants morts – de Gustav Mahler lui chuchote sans répit le secret qu’il voudrait oublier. La chute est inexorable. Seules l’amitié ou la confiance de quelques proches semblent l’ouvrir à une autre approche de son talent, susciter en lui un homme nouveau, dont la personnalité glisserait de la toutepuissance à la compassion, de l’arrogance à l’empathie profonde. Se dessine peut-être une métamorphose…
Roman haletant, parcours exalté, bouleversé par les véhémences de la musique, Prince d’orchestre est aussi une réflexion sur la part d’imprévisible que contient toute existence, sur la force du hasard et les abîmes de la fragilité humaine, sur les souffrances que convoque, apaise, et souvent transcende l’inépuisable fécondité de l’art.
Le début:
« Ce serait un triomphe.
Alexis Kandilis le savait.
Il dominait tout. Les instruments. La musique. Ce que les gens allaient ressentir, penser... Tout.
Dans la salle bondée, mille huit cents personnes retenaient leur
souffle, impatientes, déjà, de pouvoir dire plus tard : « C’était un
concert inouï. »
Tout était en place.. Au millimètre.
L’attaque se ferait avec les bois et les cuivres. Bassons, cors,
trombones... Alexis Kandilis balaya leurs pupitres du regard. Les
musiciens étaient figés, dans l’attente, les yeux rivés sur lui, prêts à
le suivre. Dans dix ans, dans quinze ans, ils raconteraient encore,
avec dans la voix un tremblement : «
Tu te souviens du concert avec Kandilis ? On avait commencé avec l’ouverture de La force du destin. C’était gé-nial ! »