La duchesse d'Amalfi, John Webster

Webster John, La duchesse d'Amalfi

En lien avec le voyage en Italie du printemps:

Témoignage des racines anglaises du mouvement romantique, La Duchesse d'Amalfi est la plus importante tragédie de John Webster (1580-1625). Elle tient une place de choix parmi les " tragédies sanglantes " de l'époque élisabéthaine, à cause de l'horreur tragique qui s'en dégage, de la force du dialogue et du grandiose relief des personnages. La pièce de Webster met en scène l'histoire vécue de la Duchesse d'Almafi : remariée secrètement à son intendant Antonio Bologna après son veuvage, la duchesse avait dû s'enfuir après cinq ans d bonheur sans pouvoir éviter la vengeance de ses deux frères, le cardinal d'Aragon et le duc Ferdinand de Calabre qui firent tuer Antonio à Milan en octobre 1513.
"La Duchesse règne sur Malfi. Elle est veuve. Elle a un intendant qu’elle épouse en secret. Par amour peut-être. Pour éprouver l’étendue de sa liberté et de son pouvoir, sans doute. Elle a deux frères, puissants et viciés, le noir et le rouge. Déchirés par la passion pour leur sœur et les lois du pouvoir, ils sèmeront mort et chaos."
La planète John Webster tourne autour du soleil Shakespeare, comme une planète grise, par refus des couleurs, baroque et dépravée, mélancolique et sulfureuse. Une planète grise qui renvoie pourtant les éclats scintillants de la vie, comme un morceau de miroir brisé qui ternit le passé et illumine l’avenir.
La Duchesse de Malfi est un monde de ténèbres et de lumières, avec "ses figures troubles et sombres, ses âmes illustrées d’eaux-fortes, où l’on déterre les mandragores et cloue les chauve-souris, un monde qui donne un goût de plomb dans la bouche et l’odeur du soufre dans les narines". La planète tourne sur elle-même, s’emballe, choisit l’enfer de la mélancolie plutôt que le soleil.
"Des hommes et des femmes s’empoignent et meurent dans les larmes, roulent corps contre corps et crachent la poussière. Et se posent lentement la main sur le front et regardent tomber les anges noirs". 

le début



SCÈNE Ire

Malfi. — Salon de réception dans le palais de la Duchesse.

ANTONIO, DÉLIO

Délio. — Soyez le bienvenu dans votre patrie, cher Antonio. Un long séjour en France vous a transformé en un véritable Français. Comment vous a plu la cour là-bas ?
Antonio. — Je l’admire. Le roi procède sagement en épurant sa propre maison avant de réformer l’État et le peuple. Il purge sa cour des sycophantes, des personnages infâmes et débauchés. C’est ce qu’il appelle, humblement, collaborer à l’œuvre du Ciel, à la maîtresse œuvre de son Maître. Il tient la cour d’un prince pour une fontaine publique qui ne doit débiter qu’une onde pure comme l’argent : si le scandale empoisonne cette source de vie, la maladie et la mort se propagent dans tout le pays. Imbu de cet esprit, le roi s’entoure de conseillers intègres qui lui dénoncent franchement la corruption.


Mon avis : Je n'avais pas pu aller voir la pièce au théâtre à Tours l'année dernière, mais les articles à ce sujet à l'époque m'avait donné des regrets, alors au moment d'envisager un voyage en Italie du Sud, lire ce texte était devenu incontournable!
Le destin d'une femme... Une femme pour le rôle-titre, rien que ça, ça donne envie non?
Des personnages complexes, sombres, le pouvoir, l'amour, la mort, la religion,  trahison, manipulation, l'italie baroque ou tout est extrême, exagéré, tourné en dérision, pas de temps mort! 

Et pour prolonger l'envie de voyage autour de cette pièce....


mise en scène et scénographie Anne-Laure Liégeois
avec Jean-Pascal Abribat, Boris Alestchenkoff, Laurent Bellambe, Sébastien Bravard, Olivier Constant, Mathieu Dion, Olivier Dutilloy, Anne Girouard, Jean-Philippe Lejeune, Nils Öhlund, Muriel Piquart, Valérie Schwarcz.


"La duchesse de Malfi" au Nouvel Olympia à Tours, janvier 2011


Dans le dossier pédagogique
Comme il était de coutume à l'époque d'écrire à plusieurs mains, il était aussi coutumier de s'inspirer de faits historiques réels et de personnes ayant réellement existé pour construire l'intrigue tout comme d'emprunter aussi bien aux anciens, Ovide, Sénèque… qu'à ses contemporains.
L'intrigue de La Duchesse de Malfi s'inspire de l'histoire vraie de Giovanna d’Aragon, duchesse d'Amalfi (petit port du golfe de Salerne en Italie, duché du Royaume de Naples au XVème siècle), fille de Henri d'Aragon et jeune veuve du duc d'Amalfi Alfonso Piccolomini (mort en 1498) dont elle avait eu un fils. La duchesse avait deux frères l'aîné qui devint cardinal d’Aragon et le plus jeune marquis de Gerace. Veuve, Giovanna avait épousé en secret l'intendant de sa maison Antonio Bologna. Par ordre de ses deux frères elle fut enfermée et assassinée avec ses deux jeunes enfants ainsi qu’un peu plus tard, en 1513, son mari Bologna.
Cette histoire fut relatée à la manière de Boccace, par un contemporain d'Antonio, Matteo Bandello (1485-1561) dans un recueil de Nouvelles publié en 1554.

Lu dans le cadre du challenge lecture de théâtre :

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